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Ma place dans ce monde est celle d’un observateur, pas celle d’un acteur.
Un introspectif, un contemplatif passionné par les questionnements existentiels. C’est ma structure interne profonde, celle qui s’impose à moi, le socle sur lequel sont gravés les d’où viens-je /où cours-je /dans quel état j’erre /quel est mon destin ?
Ça fait le sel de ma vie, le reste m’est insipide.
Aujourd’hui, je voudrais poser des mots sur les axes forts qui me tiennent à coeur, ces axes qui agissent en moi comme des boussoles et me servent de grille de compréhension du monde, à moi, l’observateur.
Pourquoi spécialement aujourd’hui ? Je sais pas, ça m’a pris comme ça.
Donc.
Tout d’abord, je suis a-thée, le a- me privant d’une notion qui m’a tenu si longtemps. Je suis bien obligé de parler en premier de cet athéisme puisque c’est lui qui m’a rendu libre depuis que je suis sa logique émancipatrice, depuis que j’ai repris possession de tous mes étages, depuis que cette liberté me permet toutes les reconstructions.
« Mais alors, dit Alice, puisque le monde n’a absolument aucun sens, qui nous empêche d’en inventer un ? ».
Athée, cela veut dire que je ne crois pas aux affirmations des théismes qui invoquent un dieu avec qui on pourrait entrer en dialogue.
Athée sans être anti-théiste pour autant, sauf si les religions qui prônent l’existence d’un dieu personnel cherchent à m’imposer leurs dogmes, au nom d’une idéologie qui devient alors suprémaciste.
Je ne rejette pas l’éventualité qu’il existe un quelque chose d’ordonnant. Un truc, un machin, un projet, un calcul, une intention, peut-être même une simple velléité mal aboutie.
Pourquoi pas.
Je m’en fous.
Quelqu’un comme moi qui fait l’expérience de l’éternité à chaque instant, de l’unité malgré ses métamorphoses nombreuses, se demandera toujours si un moi de mon Moi n’a pas vocation à vivre éternellement cette expérience d’éternité. Quelqu’un comme moi se demandera toujours si, au-delà de la décrépitude qui l’attend, le point suspendu qui le regarde en surplomb n’est pas appelé à durer par-delà l’opaque.
Je ne sais pas. J’envisage parfois la chose, mais je ne vais pas plus loin car je pense que c’est parfaitement indéchiffrable.
Je découple complètement la perspective d’une vie post mortem d’avec l’existence nécessaire d’une divinité.
Ma position est donc la position classique de l’agnostique.
Athée agnostique, oui, c’est possible.
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Je suis convaincu que notre monde est parfaitement désenchanté et qu’il n’existe aucune force surnaturelle agissante dans les divers espaces où je me promène. Pas de Dieu ni de diable bien sûr, de même qu’aucun ange, aucun démon, ni djins, ni farfadets, pas de lutins ni aucun esprit incarné par le plus petit animisme dont je pourrais être éventuellement porteur, ou encore pas d’Univers bienveillant.
Non.
Tout est parfaitement inerte autour de moi ; l’arbre, c’est du bois ; la montagne, un pli de la croûte terrestre ; la mer, beaucoup d’eau même pas potable ; le vent, de l’air qui bouge ; le soleil, un imbécile qu’il est vain de diviniser.
La seule magie que je pense réellement agissante dans notre monde est celle produite par notre cerveau aux propriétés hallucinogènes, ce qui est un de ses plus grands mérites.
Petite digression…
un « cerveau aux propriétés hallucinogènes »… je suis fier de cette trouvaille qui dit que notre outil le plus noble est l’équivalent d’une drogue. Notre cerveau est un infatigable inventeur de mondes parallèles, même la nuit quand je dors !
Au fond, pourquoi s’étonner du manque de rationalité de nos rêves ?
Organisées par le même cerveau, nos vies quotidiennes ne sont guère plus rationnelles, La vida es sueño.
S’il produit des shoots qui créent du délire, le cerveau est aussi l’auteur de merveilles artistiques, philosophiques et scientifiques, dès lors qu’il est canalisé.
Je vibre devant les merveilles de l’univers quantique !
Le cerveau.
Belle transition pour parler de l’Homme.
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Je suis un humaniste total et définitif et je place l’Homme1 au centre.
Sans le mettre au sommet.
Je commence à peine à sonder cet axe fort, mais j’en donne les premiers contours dans Les voeux d’un humaniste définitif.
Je crois que, parallèlement à un humanisme qui place l’Homme au premier plan d’un décor naturel qu’il n’interroge pas trop2, moi, je le place au milieu d’une jungle qui l’étouffe et qui veut lui faire courber l’échine constamment ; une jungle dont il cherche à s’extirper depuis toujours, par n’importe quel moyen culturel qu’il met en place. Et, dans ce domaine, l’Homme a eu du génie.
Une jungle dont j’interroge la dimension malveillante.
Ces quelques mots sont une première définition de mon humanisme définitif qui adresse des milliers de bravos et de mercis à l’Homme et l’encourage au moment où, une fois de plus, l’ordre des choses qui s’impose à lui le place au bord du précipice.
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Je sais que, tout comme toi, je fais partie d’Homo Sapiens Sapiens.
Mais je fais partie du sous-groupe Homo Sapiens Sapiens Politicus.
Peut-être que toi aussi.
Auquel cas, comme moi, tu as compris qu’on doit se prendre en charge et régir la cité en utilisant la force politique, celle qu’on crée entre pairs.
Une politique éthique.
Une politique qui n’est pas la simple gestion/administration de biens communs.
Moi, dans ce sous-groupe, je soutiens toute politique qui encourage l’épanouissement individuel et la redistribution sociale. Les deux extrémités opposées d’une même corde. C’est pas facile.
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Pour conclure cette première analyse de mon positionnement, je dirai que je défends la raison comme elle a été mise en mots par notre civilisation européenne. Je la défends, elle, et son approche du monde qui utilise l’esprit critique, sommet de ce que peut produire notre conscience.
Deuxième petite digression…
La conscience humaine… quelle boite de Pandore offerte à l’humanité !
Conscience qui nous rend conscienT d’être conscienT, conscienT d’être conscienT que nous sommes conscienT, conscienT d’être conscienT que nous sommes conscienT d’être conscienT, et ainsi de suite, jusqu’à l’infini, comme une réaction nucléaire possiblement dévastatrice.
Fléau qui fait que rien ne repose sur rien, Bénédiction qui nous oblige à toujours avancer.
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J’arrête là pour aujourd’hui et je garde pour plus tard d’autres axes forts qui viennent d’apparaitre au fur et à mesure du texte : mon identité française au sein d’une belle civilisation européenne, l’universalisme, la laïcité et un dernier axe qui tourne autour de la parole, celle qui circule si maladroitement entre les êtres humains, avec plusieurs niveaux entremêlés, celle qui sert d’emprise sur l’autre ; je parle bien de la parole et non du langage.
1- J’écris l’Homme par défaut, mais ça ne me convient pas du tout parce que ça m’oblige à embrasser les femmes, comme le disait Bossuet : « Quand je parle des Hommes, j’embrasse les femmes ». Et donc, on les laisse dans l’invisible.
Je trouve que les mots humanité, être humain sont trop désincarnés pour dire ce que je veux dire ici. Un temps, je m’étais créé l’appellation de Tout-désirant pour nommer notre espèce, mais là encore, Saint-Augustin étant passé par là, il a un peu déprécié cette appellation. Il parlait d’étant et mettait le désir en avant, en considérant que la seule façon de combler le désir de cet étant, c’était de le tourner tout entier vers Dieu. L’exact opposé de ce que je pense 🙂
Donc, pour l’instant, je sais pas.
2- Du moins, je crois, parce que j’atteins là les limites de mon érudition.